Henry David Thoreau.
A nouvelle vie et nouveau bahut, nouveau blog.
LE PAVE DE PARIS
Fontainebleau, photo prise par Sonia *.
Alors, quiconque use ses semelles
en flânant dans Paris est pris au piège de cette ville : elle lui parle, au
rythme des talons frappant le pavé ou l'asphalte, de son passé, de son présent
et de ses légendes. Elle lui montre son fleuve endigué et ses ponts où ne
s'entassent plus les maisons de bois des marchands, ses fossés où ne coule plus
l'eau de sa défense, les traces inscrites en rouge de la Bastille rasée, son
Louvre où ne logent plus les rois ou les empereurs, mais où s'entassent les
richesses fabuleuses de l'esprit, ses fausses églises gothiques et ses faux
temples grecs, pêle-mêle avec sa cathédrale où chaque gargouille reste
inséparable de Victor Hugo, ses rues et ses trottoirs un peu trop sales, et son
gazon un peu trop propre pour être le seul au monde qu'il soit interdit de
fouler. Le pavé de Paris jase : les commères et les verdurières de Ménilmontant
ou de la rue Lepic font écho à celles de la rue Mouffetard. Le pavé de Paris
porte toutes les tentations des filles qui se prostituent et des adolescents
qui se déhanchent. Le pavé de Paris reflète tout les ruissellements de l'or,
des perles et des pierres précieuses. Le pavé de Paris conte et raconte, il se
fait Delacroix, Renoir, Marquet, Utrillo, Van Gogh ou Picasso. Le pavé d e
Paris propose et le passant dispose.
Il saute et il voltige à de
certains moments, ce pavé-là : ses angles sont rudes et son poids considérable
alors, et le pavé, comme s'il était un agglomérat de poudre noire, prend feu,
explose. Et le passant, à force de marcher, de tourner dans les ruelles
profondes, de s'égarer sur une butte, de s'adosser à un arbre, de s'asseoir sur
un quai, sent bien que sous lui il se passe quelque chose.
No source.
Paris,
même si je n'y ai jamais habité, c'est toute mon enfance, du XVIII° à
République, en passant par Montmartre et Beaubourg ; les pavés de Paris
font un peu partis de moi, comme l'appartement d'Aniouk, le goût des
nouilles de Tang et frère, et l'odeur du métro un jour de canicule.